COMMUNIQUÉ DE PRESSE :
Des peuples gravement impactés par l’élevage bovin au Brésil, nouveaux éléments dans le procès contre Casino
Paris – 31 mai 2022 – À l’occasion de la venue de représentantes du peuple autochtone Uru-Eu-Wau-Wau, le CCCA (Centre pour l’Analyse des Crimes Climatiques) dévoile les résultats d’une nouvelle enquête de terrain menée en Amazonie brésilienne. Leur rapport décrit la déforestation illégale opérée dans un territoire autochtone protégé de l’État du Rondônia au profit de l’élevage bovin, et apporte de nouveaux éléments à charge dans le contentieux engagé en France contre Casino pour manquement à son devoir de vigilance.
INVASION DES TERRITOIRES DES PEUPLES DU RONDÔNIA AU BRÉSIL AU PROFIT DE L’ÉLEVAGE BOVIN
Les enquêtes de terrain menées par le CCCA font état d’invasions illégales du territoire autochtone Uru-Eu-Wau-Wau, situé au cœur de la région amazonienne du Rondônia, au profit d’exploitations bovines. 25 482 bovins sont présents illégalement dans la réserve et 13 411 hectares de forêts ont été déboisées pour le pâturage, soit davantage que la superficie de la ville de Paris.
Ces enquêtes documentent également les nombreuses conséquences de ces invasions pour les peuples autochtones concernés :
- Les dommages environnementaux causés par la déforestation et l’élevage bovin y sont estimés à plus de 128 millions d’euros (estimation à partir des pertes de services écosystémiques, le coût de réhabilitation et les coûts d’opportunités de l’usage des sols).
- Des menaces pèsent également sur la sécurité, les moyens de subsistance et la culture même des peuples autochtones. « Les peuples des terres autochtones Uru-Eu-Wau-Wau ont souffert d’un encerclement de leur territoire, constant et en expansion, qui menace leurs vies indique un membre du peuple autochtone. Nous subissons tous des menaces, elles sont nombreuses. Tous les villages sont concernés. Ils disent qu’ils vont en finir avec les autochtones.[…] Il est risqué de marcher seul et de se faire capturer. C’est dangereux d’aller en ville. »
- S’y ajoute un impact sanitaire, selon les témoignages : « Des envahisseurs ont aussi violé le droit des populations autochtones isolées en entrant en contact avec elles alors que ces personnes sans mémoire immunologique sont particulièrement vulnérables notamment en période de pandémie. »
Selon le CCCA, ces invasions des terres autochtones, leur déforestation, l’usage pour du pâturage, l’élevage bovin et leur destination pour la consommation constituent des activités illégales en droit brésilien.
Le lien de l’intégralité du rapport « LES CONNECTIONS ENTRE LA CHAÎNE DE VALEUR DU GROUPE CASINO, LA DÉFORESTATION ET LES VIOLATIONS DES PEUPLES HABITANTS LE TERRITOIRE AUTOCHTONES URU-EU-WAU-WAU EN AMAZONIE BRÉSILIENNE » publié ce jour.
DES CAS DE DÉFORESTATION ILLÉGALE DANS LA CHAÎNE D’APPROVISIONNEMENT DU GROUPE CASINO
Grâce à des documents officiels de transport d’animaux, trois fermes localisées dans le territoire autochtone Uru-Eu-Wau-Wau ont été identifiées comme connectées à la chaîne d’approvisionnement d’un abattoir de l’entreprise brésilienne JBS qui fournissait les magasins du groupe Casino au Brésil. Ces fermes sont responsables de 340 hectares de déforestation illégale. Avec seulement 10% des bovins produits dans le territoire autochtones faisant état de documents officiels de transport d’animaux, la responsabilité des entreprises pourrait être encore plus importante.
Rhavena Terto Madeira, directrice du CCCA Brésil précise : « Les engagements du groupe Casino pour éliminer la déforestation ne sont pas seulement insatisfaisants. Ces nouveaux éléments montrent que le groupe Casino pourrait également être responsable de ces dommages environnementaux en droit brésilien, par consentement ou omission. »
Pour les organisations ayant assigné le groupe Casino en justice, cette enquête illustre les conséquences des manquements de l’entreprise à son devoir de vigilance. L’action en justice, initiée à Saint-Étienne, a été transmise au Tribunal judiciaire de Paris, désigné fin 2021 comme compétent pour juger des contentieux fondés sur la loi sur le devoir de vigilance. L’audience pour fixer le calendrier de la procédure aura lieu le 9 juin 2022. Des actions portées par d’autres délégations autochtones sont en préparation.
MOBILISATION EN FRANCE : LES REPRÉSENTANTES DES PEUPLES AUTOCHTONES EN VISITE À PARIS, UN SITE D’INFORMATION DÉDIÉ
Étaient présentes lors de la révélation du rapport du CCCA en France par Rhavena Terto Madeira ce mardi 31 mai 2022 dans le cadre d’une rencontre avec les ONG françaises et la société civile :
Alice Pataxó, du peuple autochtone Pataxó de Bahia, jeune militante de 20 ans ayant pris la parole lors de la COP26 à Glasgow, pour dénoncer la déforestation en Amazonie et défendre les droits des peuples autochtones.
Tejubi du peuple autochtone Uru-Eu-Wau-Wau du Rondônia, leader indigène de 21 ans. Elle fait partie de l’association Jupaú, qui mène la lutte pour la défense des droits de son peuple et pour le développement de projets durables sur ses terres.
Neidinha Bandeira, militante emblématique qui dirige l’association de défense ethno environnementale Kanindé, dont le travail s’étend à 52 groupes ethniques autochtones afin d’arrêter éleveurs bovins envahisseurs et bûcherons illégaux.
La coalition d’organisations françaises, internationales et de représentants autochtones ayant assigné en justice le groupe Casino lance également aujourd’hui son site dédié nourrirunmondedeforeste.org pour apporter de la lisibilité à cet enjeu majeur : les deux plus gros distributeurs du Brésil, Carrefour et Casino sont français et la viande de bœuf, qui est le principal vecteur de déforestation de l’Amazonie, est vendue au Brésil.